Algérie

 le Nov. 15, 2023 par Collectif

En route vers l'Algérie

Mardi 7 Novembre

Préparatifs de départ en Algérie pour François et Momo. Préparatifs de départ pour Grenoble via Madrid et Satolas pour Yves. Yves nous quitte peu avant midi, de belles embrassades ! François et moi finissons les achats et partons dans l’après midi, le soir nous arrivons à Cabrera merveilleux écrin de nature où nous décidons de passer deux nuits pour pouvoir visiter un bout de ce lieu préservé.

Mercredi 8 novembre

Le matin, bain autour du bateau, puis visite de l’île et ses vestiges. Le soir nous décidons d’attendre vendredi matin pour partir évitant ainsi la mer trop forte le jeudi.

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Jeudi 9 novembre

Repos, lecture, jeux…Nous décidons aussi de ne pas aller sur Alger mais de nous diriger directement vers Bejaïa, le vent et la mer seront plus confortable.

Vendredi 10 novembre

Lever 4h du matin, départ 5h, à la sortie de la baie, nous hissons la voile avec un ris car nous savons que nous aurons bon vent, cap au sud-est. Dans l’après midi le vent forcit et nous prenons un deuxième ris et continuons sur le même bord, tribord amure jusqu’à Bejaïa…

Au matin (samedi 11) nous apercevons les côtes algériennes, puis peu à peu se dessine devant nous le cap Carbon avec son phare le plus haut d’Europe (400m). Passé le cap, Bejaä apparaît. Arrivée vers midi, 180 miles en 32 heures, (6 Nx de moyenne) Bravo Petit Gris !

Samedi 11 novembre

Nous sommes super bien accueillis avec escorte d’un bateau pilote et voyons défiler dans l’après-midi sur et autour du bateau, la capitainerie, la police, la douane et la police des frontières. Tous nous souhaitent la bienvenue et nous font remplir des documents en nous posant à peu près les mêmes questions. Leur réponse préférée à nos questions est qu’ « il n’y a pas de problème ! », seulement François peut aller où il veut mais à partir de demain après avoir passé la frontière comme individu (jusqu’à présent c’était pour le bateau) et Maurice reste sur le bateau. « Ils me permettent quand même de marcher sur le quai du port et d’aller prendre une douche ». Notons que ces gens sont en général très courtois et nous souhaitent chaque fois la bienvenue en Algérie !

Dimanche 12 novembre

François peut sortir car il a son visa algérien, cependant à la sortie du port, il est refoulé vers la police des frontières qui va faire son entrée en Algérie (hier, c’était seulement pour « Petit Gris »… un temps mesurable plus tard, il peut enfin sortir… Il va nous chercher à manger et en profite pour une courte balade ; sur le retour,il fait la connaissance de Sofiane qui est venu à notre rencontre.

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C’est l’unique « voileux » sur la côte est-algérienne, heureux propriétaire d'un Bavaria 33 flambant neuf, equipé grand voyage. Il nous avait suivi sur l’AIS et a vu notre bateau arriver dans le port samedi, il était sur le sien amarré sur un autre quai (la partie publique, car nous sommes dans la partie internationale). L’après midi et le soir, notre capitaine a le plaisir de visiter la ville et d’aller jusqu’au cap Carbon en compagnie de nos nouveaux amis et guides algériens, vivant ici et parlant parfaitement le français, le kabyle et l'arabe.

Echanges chaleureux et discussions de voile animées, le sujet est intarissable et Sofiane est un passionné.

Lundi 13 novembre

Départ pour Jijel vers 8h. En fait, nous ne partirons qu’une heure et demie plus tard car lorsque nous avisons la capitainerie de notre intention, nous apprenons que les différentes autorités qui étaient venues samedi à notre arrivée doivent passer pour nous donner le feu vert et avec ré-inspection du bateau.

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C’est Petit Gris qui est content, il n’avait jamais eu autant d’uniformes à son bord. Notons que ces gens sont en général très courtois et nous souhaitent chaque fois la bienvenue en Algérie ! Nous utilisons peu la voile car il y a peu de vent. Nous avions prévu une étape courte, aussi vers 15h nous arrivons devant le port de Jijel.

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La capitainerie nous en interdit l’accès et nous dirige vers le grand port commercial de Djen Djen. On voudrait bien aller au port de pêche, mais , rien à faire et nous voilà dans cet immense port, loin de la ville. De plus, malgré le visa, ils ne laisseront pas François sortir du port tout de suite. Et c’est à nouveau le même défilé des différentes autorités (voir l’arrivée à Bejaïa).

Après avoir parlementé avec la police du port et faisant valoir mon visa et mon entrée validée en Algérie par un tampon sur mon visa, je peux enfin sortir du port et me promener dans DjenDjen, faire quelques courses de produits frais, la ville de Jijel est trop loin pour s'y rendre à pied, se sera pour une autre fois.

Mardi 14 novembre

Départ pour Collo ! Vers 8h, nous avisons la capitainerie de notre départ. Ils nous demandent de patienter un peu car il y a des gros bateaux qui entrent dans le port ce qui est peu compréhensible pour nous car le port est immense et notre bateau si petit qu’il a vraiment la place de se « faufiler » sans danger. Nous attendons une heure. Quand enfin, nous avons le feu vert de la capitainerie, arrivent les gardes côte qui après visite accompagnés de la douane nous autorisent à partir. Au moment où je largue la dernière amarre, surgit un policier qui nous demande d’attendre… un quart d’heure après , arrive un gradé, képi et décorations qui tout sourire nous demande si nous allons bien et nous autorise à partir.

Notons que ces gens sont en général très courtois et nous souhaitent chaque fois la bienvenue en Algérie.

Le moteur ronronne, on embraye et là, rien , l'hélice patauge, le moteur n'a pas de puissance, petit gris reste immobile, au point mort le moteur tourne normalement et monte en régime, il y a donc certainement quelque chose dans l'hélice, marche arrière , puis marche avant, c'est mieux mais pas encore ça, on recommence la manœuvre plusieurs fois, et enfin l'hélice se libère , enfin le croit-on car elle semble pousser à nouveau le bateau normalement.

Plus tard dans l'après midi, profitant d'un moment de calme sans vent, Momo se baigne, et plonge avec masque et bouteille pour examiner l'hélice, il remontera un paquet de cordes restées coincées.

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Djen Djen est un grand port de commerce et on croise les portes containers et autres gros navires.

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Plus tard le vent revient, on retrouve le plaisir de la navigation à la voile sur une mer lisse !

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L’accueil à Collo est très courtois, mais nous passons à nouveau par les étapes obligatoires, (voir arrivée à Bejaïa et Djen Djen ). Notons que ces gens sont en général très courtois et nous souhaitent chaque fois la bienvenue en Algérie !!!

Collo est un jolie port de pêche, mais malheureusement pour les pécheurs, le poisson se fait rare et les pêches ne sont plus ce qu'elles ont été nous explique Ahmed.

Ahmed, rencontré sur le quai est un pêcheur du coin maintenant à la retraite, il nous raconte que son grand père a été l'un des premiers pêcheurs de Collo, que ses parents ont émigrés en France à Saint Tropez , mais que lui est revenu à Collo à l'age de 17 ans pour prendre la suite de son grand père. Je perçois chez Ahmed qui parle très bien français une certaine amertume quand il parle de l'âge d'or de Collo.

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Ici aussi il y a beaucoup de bâtiments qui datent de la période où l'Algérie était française, entre autre la cathédrale de Collo est intacte , elle est utilisée par une association d'échange de livre.

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Et la mairie

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A quoi ressemble la mairie me demande Ahmed ?

Ne sachant pas trop quoi lui répondre j'essaie :

un ancien cinéma (pensant au film cinéma paradiso) ?

une prou de bateau ?

"Tu n'y est pas du tout chef, tu connais le Général de Gaulle ?

Souvient toi de sa casquette et regarde à nouveau la mairie ..."

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Mercredi 15 novembre

Préparatif de départ de Collo, il y a entre le bateau et le quai une quantité impressionnante d'objets flottants de toutes sortes, tous excellents candidats à se prendre dans l'hélice. Il s'agit donc d'un départ très technique, mais cette fois la solution n'est pas décrite dans le livre des Glénans, il faudra leur proposer un additif.

Mais on n'en est pas encore à la solution, voici les autorités qui se présentent pour les traditionnelles formalités de départ, cette fois on commencera par les gardes côtes, puis viendra la police des frontières pour finir par la douane. Comme l'avouera le douanier il s'agit d'une pure formalité car étant arrivés hier au soir et la fouille ayant déjà été faite il ne pouvait pas y avoir beaucoup de changement, et cela d'autant plus --mais le douanier ne le savait peut-être pas-- que pendant toute ma promenade dans Collo, guidé par Ahmed, nous étions accompagnés par un policier de la PAF en civil.

Contrairement à la Corée du Nord où les accompagnants ont pour rôle de surveiller vos faits et gestes, en Algérie il n'en est rien, le policier qui nous accompagne est là pour assurer ma sécurité . Les Algériens sont encore traumatisés par les années de guerre civile dites années noires durant lesquels de nombreux étrangers ont disparu, kidnappés, rançonnés, assassinés.

Il s'en suivra une conversation sympathique avec le douanier qui trouvera là une bonne occasion de pratiquer son français, qui était déjà d'un bon niveau.

10h tout est en règle, on nous souhaite la bienvenu et le bon vent pour rejoindre Skikda.

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17h Arrivée à Skikda, les autorités du port nous placent au fond du port, à côté d'un autre voilier français déjà sur le départ, dommage on n'aura pas le temps d'échanger nos impressions. Les formalités habituelles s'enchaineront au rythme et avec la cordialité bien connus des autorités. Le port est dans une activité soutenue, on est entouré d'une noria de camions venus décharger un gros cargo. François doit parlementer avec la police du port pour sortir du port : " il se trouve que j'ai un visa et que mon cas est pour eux insolite car aucun des marins des navires de commerce n'ont de visa, ils sont tous consignés au port."

Skikda est une belle ville. Immédiatement surplombant le port, la grande place de Skikda est dallée de marbre.

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Derrière la place la rue principale de Skikda, bordée d'arcades, les magasins très européens se succèdent. Les pâtisseries en particulier alignent des gâteaux très français : éclairs, mille feuilles, tartelettes, macarons, ...

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et le théatre de Skikda.

Avant de regagner le bateau je cherche un restaurant pour ramener un plat chaud typique , autour de moi j'observe qu'il n'y a que des pizzerias !

Skikda n'a rien à envier aux villes européennes !

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Jeudi 16

Préparatifs de départ pour Annaba, tout se passe comme à l’accoutumé, la procédure est maintenant bien rodée ainsi que les cordiaux échanges avec les autorités.

Malgré tout petit gris commence à s'impatienter.

Annaba est distante de 55 miles, le vent est annoncé faible il nous faut partir tôt.

Cette fois nous y parviendrons, à 13h30 on passe le cap Toukoush à 18 miles de Skikda.

On est contacté par les gardes côtes qui trouvent qu'on navigue trop près des cailloux, pour les rassurer on s'en éloigne très légèrement.

Annaba c'est encore loin ?

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Rame !

Le vent nous emportera jusqu'à Annaba sans mollir.

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Arrivée à Annaba , la capitainerie reste muette à nos appels répétés ...

Suivant les indications du guide nautique on se dirige comme des grands vers le fond du port, et on s'amarre devant la capitainerie. Et là surgit un agent du port étonné de notre arrivée sans message sur le canal 14, visiblement ils n'écoutait pas le canal 16 qui est pourtant le canal d'appel prioritaire.

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Venir en Algérie en voilier avec ou sans visas ?

J'avais parcouru avec beaucoup d'intérêt le voyage du bateau ANAK http://anak.over-blog.fr/article-la-cote-d-algerie-en-voilier-seul-et-sans-visa-111228071.html) en 2012 . Anak et son skipper avait fait en solo 12 escales en Algérie sans visa. Comme j'avais depuis longtemps envie de retourner en Algérie, l'idée m'est venu de suivre les traces du voyage d'Anak. Nous n'en ferons qu'une partie de Bejaia à Annaba.

J'ai eu la chance d'obtenir mon visa pour l'Algérie avant de partir, Momo n'a pas eu cette chance.

Les autorités algériennes sont organisées selon un schéma hérité de l’administration française :

- les gardes côtes

- la police des frontières

- la douane

- les autorités portuaires.

Quand un bateau arrive dans un port il voit successivement passer les quatre administrations :

- les autorités portuaires en premier qui placent le bateau sur un quai dans un port de commerce (il n'y a qu'une seule marina en Algérie),

- les gardes côtes qui suivent les bateaux en transit et d'escale en escale,

- la police des frontières,

- la douane.

Chaque administration envoie entre deux et trois agents et demande l’intégralité des papiers du bateau, notons que cette visite est très courtoise, que les agents parlent français en grande majorité et que nous sommes «les bienvenus au port et en Algérie!», rappelons que sans visa il n’est pas possible de sortir de l’enceinte du port.

Ces mesures ont été prises après les années noires,(1990..1995) pour permettre d’assurer la sécurité des marins en transits et elles n’ont pas été modifiées depuis. Comme la situation sécuritaire s’est beaucoup améliorée, on peut espérer que ces mesures soient assouplies dans les prochaines années.

Il est aussi important de préciser que les escales dans les ports de commerce algérien sont gratuites, et qu’on peut y laisser le bateau en toute sécurité plusieurs jours consécutifs sans aucun problème.

Il faut aussi noter que les ports de commerce ne sont pas des marinas et qu’ils n’offrent aucune servitude ( eau, électricité, sanitaires).

Muni d’un visa il faut faire des formalités supplémentaires pour entrer en Algérie, affranchir le passeport avec le tampon d’entrée. Cette formalité n’est pas fréquente dans les ports de commerce car les marins n’ont en général pas de visa, elle dure plusieurs heures, le temps de trouver les bonnes personnes de la police des frontières, celles qui possèdent le tampon ha-doc. Une fois le tampon obtenu il faut encore demander un bon de sortie du port à l’administration des douanes cette fois et à chaque fois que l'on veut ressortir.

Au total il faut compter quelques heures (2 à 3) pour les formalités d’entrée et presque autant pour les formalités de sortie.

Comme nous ne sommes jamais autorisés à entrer dans un port de pêche, les formalités sont faites dans chaque port visité.

Nous avons fait des escales d’un jour à deux dans cinq ports Algériens : Bejaia, Djen Djen, Collo, Skikda, Annaba, arrivés généralement en fin d’après midi, après les formalités, il ne restait que très peu de temps, souvent le lendemain à consacrer à la visite de la ville.

Une fois sorti du port on est immédiatement plongé dans le tourbillon très animé des villes algériennes et ce jusqu’à tard le soir. Les rencontres spontanées sont possibles, faciles et jamais forcées. L’Algérie n’a pas développé le tourisme et c’est notable, on n’est jamais interpellé pour aller diner dans un restaurant, pour acheter un souvenir, pour visiter la ville par un guide improvisé. En revanche une fois un contact pris, les conversations sont tout de suite intéressantes et très nourries. Les algériens sont très sensibles à tout ce qui vient de France , beaucoup d’entre eux y ont de la famille, ils parlent parfaitement français et on perçoit leurs souhaits que nos deux pays parviennent un jour à rétablir des relations privilégiées à tous les niveaux : social, économique, culturel, scientifique, touristique.

Au moment de sortir de l’Algérie, en plus des formalités de départ habituelles, celles et ceux qui ont un visas doivent officialiser leurs sorties et faire viser leurs passeports, cette formalité, simple pour ceux qui quittent le pays par avion ou par ferry, est plus compliquée dans un port commercial car le cas est peu fréquent et la procédure n’est pas maitrisée par les autorités portuaires, dans mon cas c'est avec l'aide d'un agent proposé par la capitainerie que j'ai pu faire en 1h les formalités de sortie.

En conclusion j'invite tous les candidats à l'expérience à ne pas se laisser décourager par l'importance des formalités, mais j'ajouterai quelques conseils pour profiter au mieux des escales en voilier en Algérie :

- d’avoir un visa,

-d'avoir des photocopies des papiers nécessaires (compter quatre liasses par port visité),

- de prévoir de rester dans le même port plusieurs jours consécutifs, c’est possible , c’est gratuit et il ne peut rien arriver au bateau qui est extrêmement bien surveillé,

- de choisir les villes escales qui jouxtent leurs port de commerce, ce qui est souvent le cas des grandes villes.

Bon séjour en Algérie, c'est un pays magnifique et accueillant!


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